Comment un simple album de famille devient une œuvre sur la mémoire, la maternité, la filiation, le sens de l’individu dans la famille, la transmission, voilà ce que réussit à transmettre Marianne Khoury dans son documentaire «Let’s talk», le seul film égyptien de la compétition internationale.
La réalisatrice, née dans le cinéma d’un père producteur-distributeur et d’un oncle maternel réalisateur, à savoir le célébrissime Youssef Chahine, a été pendant longtemps productrice avant de se placer derrière la caméra pour réaliser des documentaires à l’instar des «Passionnées du cinéma» sur les origines du cinéma égyptien.
Toute destinée à devenir cinéaste, Marianne Khoury, personnage principal du film, mène une discussion banale avec sa fille qui les conduira à évoquer l’histoire de leur famille. Une famille baignée dans le cinéma depuis des générations et qui va se focaliser sur Youssef Chahine, le plus doué d’entre eux tous et dont les films sont inspirés de son histoire familiale personnelle. Entre le père, roi de la distribution dans le monde arabe, représentant la société américaine la Fox, et l’oncle maternel, Youssef Chahine, artiste rebelle ayant fait des études aux USA, Marianne finit par choisir la voie de l’oncle qui lui proposa de travailler avec lui et après la mort de son père. Son premier film en tant que productrice exécutive est « Adieu Bonaparte » (1985), puis « Le sixième jour » et « Alexandrie encore et toujours».
Plus tard, elle passe à la réalisation avec un premier film «Le temps de Laura». Le début d’une aventure prometteuse dont les fruits se retrouvent dans «Let’s talk» où avec un filmage simple sans fioritures, étayé d’images de photos issues de l’album de sa famille ainsi que de vidéos tournées lors d’événements : anniversaire, mariage etc., Marianne Khoury propose aussi des entretiens avec Gaby et Elie Khoury sa vieille tante et sa fille. Elle fait donc défiler les générations de femmes et d’hommes dans l’objectif d’assurer la continuité entre les générations et, surtout, préserver l’héritage familial : le cinéma.
Youssef Chahine est très présent dans le film, apportant son témoignage sur les relations qu’il entretient avec ses oncles et ses tantes ainsi que des extraits de ses films dont «Alexandrie pourquoi» ou «Al Ousfour» dans lesquels il s’est fortement inspiré de sa famille. Le film évoque l’amour, les conflits, les moments de bonheur et les moments difficiles dont la maladie de Marianne elle-même qui a eu à surmonter avec courage son cancer du sein. «Let’s talk» est un film personnel et particulier, réalisé avec humilité et simplicité.